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14 décembre 2006

La Prisonnière du Désert (The Searchers) de John Ford - 1956

searchersIl faut bien reconnaître que là, on est franchement dans l'excellence totale. Si Ford n'a que rarement réussi à déclencher en moi une émotion autre qu'objective, j'ai toujours admiré l'esthétique du bonhomme. The Searchers est un magnifique exemple du génie du cadrage de Ford : les paysages, qu'ils soient naturels ou en carton pâte, sont sublimement utilisés pour donner de la grandeur solennelle à chaque plan. Que ce soient les grands canyons qui se détachent sur des ciels d'un bleu incroyable (on dirait même qu'il met en scène les nuages), ou les intérieurs sublimement éclairés et mis en couleurs ; que ce soient les scène de nuit, bleutées, profondes, d'un calme fascinant, ou les scènes de jour, placées sous un soleil qu'on sent torride, l'invention et la sensibilité visuelles bluffent à chaque fois. Ford se permet même de filmer la neige, absente dans les westerns en général.

Et puis il y a toujours cette fascination pour les hommes, qui trouve encore une fois toute son ampleur dans50036381_2bf4f535be_m le corps de John Wayne, cabossé, lourd mais étrangement grâcieux. Le dernier plan du film (Wayne cadré dans une ouverture de porte qui bouffe les 3/4 de l'écran) contient une puissance incroyable, non seulement parce que le personnage a accompli sa longue mission, mais aussi par l'impression de solitude totale qui se dessine par cette façon de cadrer. Ford aime la virilité, certes, mais il aime aussi la métaphysique, la confrontation de ses hommes avec la mort, l'isolement, avec eux-mêmes.

C'est d'ailleurs le sujet du scénario : retrouver par tous les moyens une jeune fille enlevée par les Indiens, pour lui faire retrouver sa culture originelle. La longue quête searchers400culmine avec cette courte scène où, en deux ou trois mouvements (capturer la nana en fuite, la soulever dans ses bras comme une petite fille, la serrer contre soi), Ford capte le discret basculement d'un état à un autre, et rend le personnage secondaire de la fameuse "prisonnière du désert" attachant et capital. Alors, certes, le film est assez raciste, cantonnant les Indiens à une horde de sauvages infoutus de prononcer 3 mots d'anglais, ne vivant que de violence et de hurlements. Certes, le personnage de Wayne, à la limite du fascisme, semble fasciner de façon assez trouble John Ford. Certes, on est dans sa période : "Un bon Indien est un Indien mort" (et auquel on crève les yeux par ailleurs, histoire de bien enfoncer le clou), opinion qu'il reverra heureusement par la suite. Mais pas quelques plans fugitifs, on sent que Ford est aussi préoccupé par la violence irrationnelle du monde (un Indien qui fuit devant l'attaque des gentils Blancs, un bébé dans lesdyn006_original_499_281_pjpeg_48155_fba6aea44360c3d07d2c588984bf399e bras ; une Indienne, achetée par erreur par l'un des héros, qui suit à courte distance ses nouveaux maîtres...), et qu'il a déjà une propension indéniable à renvoyer tout le monde dos à dos. L'un des héros est d'ailleurs plus métis que Blanc, et c'est lui qui a le plus d'attachement à la captive, sa demie-soeur.

Le film est étrangement dépourvu d'actions, ce qui le rend mélancolique et doux. D'autant que Ford accorde également beaucoup d'attention aux scènes "intimes", autour du joli couple sans cesse séparé par la quête obsessionnelle du jeune homme de retrouver sa soeur. Il y a une longue séquence enlevée et drôle lors d'un mariage foireux qui montre que le gars n'est pas seulement un cow-boy viril et sans sentiment. Bref, The Searchers est une merveille.

Go to the Mid-West

Commentaires
A
J'ai vu ça aujourd'hui, la prisonnière du désert... L'éducation Nationale nous organise ce genre de formation, 6 heures de cinéma presque non-stop, pour ensuite voir les films avec nos classes pendant l'année scolaire. Moi qui ai du mal à regarder un film en une seule fois, d'ordinaire... Là on s'est d'abord tapé un programme baptisé "Les pionniers du cinéma", une bonne heure de courts et moyens métrages du début 20ème siècle, les frères Lumière, Méliès (Le voyage dans la Lune colorisé par Lobster Films et accompagné de musique techno, ça m'a laissé perplexe...), le premier dessin animé, le premier western de l'Histoire (The great train robbery)... Sympa. Puis Singing in the rain et enfin La prisonnière du désert. Cool d'être payé pour regarder des films, non? Et de les montrer à des gamins de ZEP (bien que l'an passé certaines familles aient privé leur rejeton de "L'argent de poche" parce qu'on y voit fugacement le bout d'un nichon d'une femme sous la douche).<br /> <br /> En tout cas, merveilleux voyage en Arizona pour moi cet après-midi, J'ai même aimé John Wayne, et son personnage un peu plus complexe que d'ordinaire... Et c'est vrai que de la neige dans un western, ça surprend !
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