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27 novembre 2006

Les Damnés (La Caduta degli dei) (1969) de Luchino Visconti

2Machiavelisme sur fond de nazisme: trahison, perversité, volonté de survivre ou soif de pouvoir ainsi va la vie au temps des S.S., un récit puissament conté par Visconti.

En suivant le trajet de Martin Von Essenbeck, on peut avoir une légère idée des bouleversements qui ont lieu au cours de cette période: s'il se travestit en ange bleu au début du film et passe pour un amusant personnage efféminé, on devine rapidement une ombre de perversité dans son goût pour les petites filles - il en conduira une d'ailleurs au suicide; manipulé à la suite de cette affaire - il est victime d'un chantage- il apprend assez vite et devient à son tour, à la mort du maître-chanteur, manipulateur: personnage outrageusement dominé par sa mère, il décide de lui faire payer chèrement cet abus de pouvoir puisqu'après avoir couché avec elle (ah oui ça y va pas avec le dos de la cuillère), il forcera celle-ci, après avoir revêtu sa superbe nouvelle tenue de Waffen S.S. noire, à se suicider avec son nouveau mari. Il s'agit plus d'un concentré d'apprentissage qu'un véritable parcours initiatique. D'ailleurs les deux jeunes gens, qui au début du film font figure de marionnettes auprès des adultes, vont très vite s'apercevoir qu'au jeu des alliances avec les plus forts on peut rapidement retourner une situation à son avantage. C'est d'ailleurs ce qui fait froid dans le dos tout lethulin_3_1_ long de l'histoire: ce sens de l'opportunisme dont chacun fait preuve avec la montée du National-Socialisme dont l'idéal (la prise de pouvoir absolu) est, comme le dit Martin, quelque chose de "facile à comprendre". Seulement plus d'un s'y cassera les doigts, à l'image de Frederik Brukman, arriviste de première, qui ne cherchera dans son association avec les S.S. que l'enrichissement personnel. Il comprendra qu'il a mis "le doigt dans l'engrenage": après s'être fait le meurtrier de deux des patrons des acieries Essenbeck pour prendre leur place, il finira par se rendre compte qu'il a fait le mauvais calcul (rien n'arrête les nazis, et personne ne peut leur tenir tête quelle que soit sa position) et qu'il s'est condamné lui-même; il devra à son tour se sacrifier pour le IIIème Reich. Aucun échapatoire possible dans ce monde si ce n'est celui de disparaître corps et âme derrière l'uniforme des Waffen S.S.

Dans le fond, un récit presque claustrophobique, et dans la forme, des séquences qui sont de pures merveilles de mise en scène (le suicide de la petite fille, la fête "virile" des S.A - genre de mega-partouze travesto-hétéro-homosexuelle qui se finit dans un bain de sang sous le feu des S.S. -, le mariage final de Sophie Von Essenbeck (immense Ingrid Thulin) peinte en blanc, avec déjà ce visage de mort, peu de temps avant son suicide au cyanure - où elle restera droite comme un i dans son canapé, gardant sur le visage un sourire effrayant -...), des cadres d'ensemble qui très souvent à l'aide d'un zoom d'une précision diabolique finissent en gros plan sur l'un des personnages comme si la caméra en montrant leur action finissait par révéler leur âme, une utilisation des éclai1rages dont Visconti semble être le maître absolu (scène finale à la bougie avant de retomber dans une pénombre mortifère, scène où éclate la folie de Martin avec cet éclairage vert hallucinant sur le visage de Frederik qui semble avoir déjà dans la bouche le goût de la mort)...

Bref, un voyage au bout de l'enfer de l'âme humaine, une noirceur "étincelante" tout comme le feu de ces cuves dans l'acierie, au générique du film, qui semblent fondre ensemble toutes les bonnes volontés. Ne demeure au final qu'un magma infernal qui représentent toutes les actions diaboliques de ces Machiavel en puissance, ou plus simplement de ces êtres humains - c'est selon. I will survive. [Charlotte Rampling, en passant, à 23 ans (toujours toujours), est d'une beauté à se damner]

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