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22 octobre 2006

LIVRE : le Guépard de Lampedusa - 1955

Sans_titreEssayez juste de lire les deux derniers chapitres du Guépard en écoutant Vivaldi (hommage conjoint à Jean-Marc et à la p'tite Anne), et si aucune larme ne sort de vos yeux émus, vous êtes la froideur incarnée. Ce magnifique roman, qu'on dirait daté du XIXème siècle de Stendhal, a gardé toute l'élégance de style des grands écrivains classiques, tout en n'oubliant jamais de développer une ironie acerbe très moderne. C'est un mélange, si vous voulez, entre la fulgurance poétique de Stendhal et la critique de Radiguet.

L'histoire, vaste, ambitieuse bien que minutieuse, est celle du Prince de Salina, dernier représentant d'une lignée sicilienne tournée vers la convenances et la droiture politique, et en même temps amoureux d'astrologie, et féru de petites bonnes femmes. Les personnages qui gravitent autour de lui appartiennent déjà à l'époque suivante, celle qui amènera la guerre de 14, celle qui oubliera dans l'ambition sociale les sensibilités de l'amour et de l'art. Mais ce n'est pas tant la trame que l'écriture qui ravage dans ce bouquin : magnifiquement rendue par une traduction très class de Fanette Pézard, elle est constamment poétique, ciselée, pleine de sous-entendus, d'ironie tranquille. Que ce soit dans la description d'un jardin sicilien, dans l'observation d'un chien, ou dans des monologues sur l'Histoire, Lampedusa est un joailler, un de ceux qui croient encore à la puissance d'une évocation ou d'un rythme. Le chapitre sur la mort du Prince, précis, métaphysique et poignant, est à inscrire franchement parmi les plus belles pages sur l'agonie. Très classique, Lampedusa (à moins que ce ne soit la traductrice), se permet des alexandrins classiques au détour d'un paragraphe (le plus beau, c'est celui qui décrit justement la mort de Salina : "Le fracas de la mer se calma d'un seul coup"), se permet des longues descriptions de couleurs ou de collines, se permet de goûter les mots dans ce qu'ils ont de plus pur (notamment une description de dîner de gala sublime). Bref, c'est de pureté de langue qu'il s'agit ici, en même temps que d'appréhension du monde au-delà des convenances mondaines. M'en vais revoir le film, moi.

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