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12 octobre 2006

Company (The Company) de Robert Altman - 2003

company_the_das_ensembleDepuis quelques films, Altman a une tendance à lâcher un peu le scénario pour livrer plutôt des portraits, ou filmer des chroniques de milieux. Pourquoi pas, ça a donné parfois de très jolies choses, par exemple le parfait Short Cuts. Ici, cette option est poussée à son maximum : The Company est totalement dépourvu de trame, et on cherchera en vain, avec il faut l'avouer un peu de perplexité, le réel sujet du film. Qu'est-ce que Altman veut nous dire, qu'est-ce qu'il est en train de nous montrer ? Que le milieu de la danse est très difficile et exigeant ? Que les producteurs d'entertainment américains s'enrichissent aux dépends des jeunes danseurs, qui dégustent physiquement et financièrement ? Que les danseurs sont des gens comme tout le monde, qui mangent et cherchent des capotes à minuit ? Que sous leur tutu rose ou leur collant ringard se cache, outre les ornements génitaux habituels, un petit coeur qui bat? Dans l'expectative, on cherche à se raccrocher à un personnage, ou à défaut à une mise en scène...

Et c'est là qu'on a mal : c'est raté côté visuel autant que côté trame. Je ne sais pas si c'est ça que les Américains appellent "danse contemporaine", mais on assiste à des ballets d'une ringardise incroyable, une sorte de néo-classique usé jusqu'à la moelle, et un défilé de chorégraphies 18370280kitschissimes : lumières affreuses, musique des années 80 (qui évoquent parfois Flashdance, c'est dire la modernité de la chose), costumes hilarants, tout y est pour qu'on passe un sale moment. Si ça c'est contemporain, je suis obèse mormon. A côté, Jean-Claude Petit, c'est un punk plein de Valstar. On a droit à Neve Campbell que je rêvais déjà de voir mourir dans Scream, et qui est agaçante comme tout encore une fois. On a droit aussi aux répétitions dans les grandes salles au miroir, avec le maître de danse (Malcolm McDowell rescapé d'Orange Mécanique, mais ici malheureusement sans sa batte) qui fait "un, deux, trois, quaaaatre" et les foulures du tendon d'Achille (ou un truc du genre). Et même à une scène où le même McDowell explique à ses interprètes qu'ils vont devoir faire un spectacle sur le Flower Power, les manifs, la contre-culture, etc... et qui donne au final une infâme bouillie avec des sauts de biche à deux balles, des portés à la con et des pointes de pied à l'infini. Bref, une horreur au niveau de la danse pure, ce qui est assez ballot quand il s'agit d'un film sur la danse.

companyHeureusement, Altman demeure un bon gars, et il reste souvent inspiré quand il s'agit du filmage. En grand connaisseur de l'espace, il met sa caméra à l'unisson des mouvements chorégraphiques, et capte de très jolies choses. Des lumières très sensibles (belles couleurs sur la salle de répétition, on sent que le pépère a regardé Degas), un rythme très bien tenu, pour tout ce qui est des scènes du quotidien; et surtout une scène de ballet centrale, où il alterne en flux serré les gros plans sur une chorégraphie pourtant ample, et capte subtilement, là un sourire, ici un pied qui se tend, ailleurs des mains qui se croisent. Dans ces moments-là, on n'est pas loin de Ophüls, je le dis tout net. Le gars emplit son écran de couleurs, de mouvements, avec un grand sens du rythme et du plateau.

The Company est donc une bouse, transcendée comme toujours chez Altman par une mise en scène grâcieuse et discrète. Filmé par n'importe qui d'autre, on aurait eu droit à Footloose II. La danse pseudo-contemporaine peut remercier ce film, elle y sauve ses meubles à l'arrache.

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