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Shangols
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13 octobre 2021

La Haine (1995) de Mathieu Kassovitz

lahaine_1_Avant de s'embourber dans Assassin(s) et de se noyer dans Les Rivières Pourpres, le fils Kassovitz avait réalisé ce film très médiatisé sur les banlieues. Je suis pas vraiment un grand fan, je préfère la subtilité et la finesse (notamment dans la direction d'acteur et dans le propos) de Petits Frères de Doillon ou L'Esquive de Kechich, mais disons que pour mes petits étudiants de FLE, c'est une bonne introduction au verlan et au "monde foisonnant" comme dirait Cousteau, des banlieues.

Oui, Kasso ne recule devant rien pour booster l'efficacité de son film, notamment dans la bande sonore -musique et effets surround-. Sans tomber dans le manichéisme primaire (il y a aussi un ou deux gentils flics, et des gars en banlieue qui n'ont pas inventé la poudre) on n'en est jamais loin non plus et certaines scènes un peu olé olé (les barbecues sur les toits, les pros du rap et du hip-hip) sont vraiment à la limite. Mais bon, Kasso a pour la première fois les moyens de ses ambitions (qui lui seront malheureusement fatales par la suite) et certaines scènes -derrière les références un peu trop obligées et appuyées de Scorsese et De Palma- sont plutôt réussies : ainsi cette belle idée de mise en scène de Vinz face à son miroir, en fait face caméra, qui se monte le bourrichon tout seul en imitant De Niro, comme si parfois la haine des autres était dûe en partie à une haine de soi-même. C'est peut-être facile mais la séquence fonctionne et les clins d’œil de Kasso à Un Monde sans Pitié (La Tour Eiffel qui s'éteint) ou l'envolée de la caméra au-dessus des toits de la cité sont également de bonnes scènes de bravoure. La fin, elle, marque les esprits, le Kasso sachant conclure. Quant à la scène de drague (plus lourd tu fais pas, je me demande même si Les Inconnus n'y auraient pas mis plus de finesse) dans la galerie d’œuvres contemporaines (promis Bibice j'en parle po, des trucs exposés, on tombe trop dans le ridicule), elle démontre la difficulté de Kasso à traiter en finesse des relations h/f. C'est bien dommage car Métisse laissait espérer beaucoup plus dans cette veine.

Amis producteurs, ne donnez plus un rond à Kassovitz et il nous reviendra avec des films honnêtes. (J'ai beaucoup d'influence dans le milieu).   (Shang - 07/07/06)


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Je suis atteint de la même passion pour Kassovitz que mon camarade, et j'ai du coup à peu près la même opinion que lui sur La Haine. Le film a au moins cette qualité d'être arrivé avant tous les autres, en France en tout cas, et d'avoir réellement inauguré un style, voire même annoncé une génération : sans lui, peut-être Riché ou Noé n'auraient jamais existé (qui a dit super ?). En tout cas, avec tous ses défauts, ses tics de petit malin surdoué, sa crânerie, son formalisme adolescent, La Haine apparaît d'une sincérité totale, et donne sûrement un portrait très juste des banlieues à ce moment-là, ces années 90 où elles commençaient à faire entendre leur voix, où NTM envahissait les oreilles des gamins, où les bavures policières commençaient à devenir un peu trop courantes. Kasso plante sa caméra là où ça se passe, et l'authenticité de ce qu'il filme lui fait honneur : outre les trois acteurs principaux (j'ai largement préféré Saïd Taghmaoui, pour ma part ; Cassel m'a paru trop "acteur", trop dans la maîtrise de ce qu'il fait, alors que l'autre a un lâcher-prise naturel qui touche vraiment), on y voit le quartier dans toute sa crudité, avec ces figurants hilares et agités qui rendent pleinement la vie de la cité. Le film est rempli de trucs et de gadgets pas forcément géniaux, certes, mais rien que pour avoir su capter cette vie, le quotidien tout platounet de cette génération inoccupée et forte en gueule, on sait gré au gusse : il y a dans ces scènes simples de drague, de blagues racontées au coin d'un trottoir, de vannes, de démonstrations de force minables, beaucoup plus d'authenticité que quand Kassovitz filme sa trame, trop plaquée là-dessus pour convaincre. L'histoire de ce flingue volé aux flics et qui circule dans le quartier, et qui finira malheureusement utilisé contre ses habitants eux-mêmes ("L'important, c'est pas la chute, c'est l’atterrissage") intéresse peu, à commencer par le réalisateur lui-même. Avouons quand même que les effets incessants sont parfois bien spectaculaires, et que Kassovitz, même pas 30 ans à l'époque et un seul film à son actif, n'est pas manchot pour doper la moindre de ses séquences et lui donner une aura mythique. Précurseur, efficace, frontal : un film qui a marqué, qu'on le veuille ou non.   (Gols - 13/10/21)

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