Un film noir avec une fin de science-fiction c'est pas commun, certes.
Ca commence de façon éblouissante: la caméra suit la course de jambes nues sur l'asphalte noir, une jeune femme en imper cherche désesperément à stopper une voiture, un bolide de sport stoppe furieusement, un barrage de police est dressé pour rechercher une femme qui s'est enfuie d'un hôpital psychiatrique... Elle a du bol, elle est tombée sur Mike Hammer -en plus, il n'a pas la moustache- il perce le barrage en la faisant passer pour sa femme.
Elle sera tout de même tuée et Mike Hammer enquêtera pour savoir quel secret elle cachait !!(Vous voyez pas le rapport avec Les Aventuriers de l'Arche perdue ? Normal. Et pourtant.) On a droit à toute une pleïade de fausses pistes, Mike Hammer tombe les pépettes en un tour de main (la première scène du baiser ci-contre est diablement sexy), stoppe les méchants en deux secondes avec un truc qu'on ne voit jamais et se fait tirer dessus mais s'en sort toujours, son ami garagiste meurt écrasé sous une voiture, victime de ces gens dont on ne voit que les chaussures et les pantalons noirs, la police est aussi de la partie et a l'air super inquiète..., c'est un polar quoi. De très bonne facture d'ailleurs, même si le rythme du début retombe peu à peu. Quant à ce que Mike est censé découvrir, ce ne serait po gentil de le dévoiler même si la vérité (les qualités du film) est ailleurs.
1) Le héros n'est pas sympathique. Ce détective est un bloc de virilité dans ce qu'il a de plus répugnant : machisme, égoïsme, sadisme (et Aldrich d'en rajouter visuellement sur la jouissance qu'il éprouve à cogner et détruire). Et ce que montre bien le film, c'est qu'il est paradoxalement complètement le jouet des femmes qu'il méprise mais que Aldrich met en valeur : depuis la première "leçon" donnée par l'auto-stoppeuse cultivée, l'amour entier de sa secrétaire jusqu'à la fourberie de la traîtresse.
2) Si l'on veut bien "mythologiser" le personnage de détective depuis Hammett et Chandler, on peut dire qu'il est un Prométhée moderne. Il dévoile le secret des puissants (richards ou organisation secrète) et s'y brule toujours un peu les ailes (ou le foie pour les alcolos). Et il est piquant de voir Aldrich -ou son scénariste Bezzerides- nous montrer l'organisateur du complot comme un pédant amateur du panthéon antique. Depuis la scène initiale de torture où s'adressant à un comparse maladroit qui ne voit pas qu'il est allé trop loin, lui rétorque "qui es-tu pour faire revenir les vivants d'entre les morts ?" ; jusqu'à la scène finale où son refus de s'expliquer clairement avec sa complice autrement qu'en lui balançant des métaphores grecques causera sa perte.
3) L'art du montage et l'utilisation du nocturne à l'oeuvre dans ce film me semble avoir eu une influence sur Alphaville de Godard.
Bien à vous deux.