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8 mars 2006

Eureka (Yûreka) de Shinji Aoyama - 2000

eureka1Shinji Aoyama peut taper la bise à Kitano et à Wenders, voire leur doit une sacrée caresse buccale. De Kitano, il a les personnages mutiques, l'économie dans la narration, l'énigmatisme (page 843 du Petit Larousse), le monde dépeuplé, la métaphysique desespérée, la musique. De Wenders (je parle des premiers Wenders, pas des clips de mode) la façon ample de filmer, le rythme, la passion des enfants et des paumés.

Au début d'Eureka, on craint de tomber sur le énième petit malin : un noir et blanc hyper-supra travaillé (c'est pas un noir et blanc d'ailleurs, il y a des roses, des marrons, des "boues" qui font penser à Pluie noire); un sujet distillé très lentement, comme persuadé qu'il nous tient d'entrée comme des cobayes ; des acteurs qui jouent atones (je suis un grand fan de ce Kôji Yakusho, qui a fait tous les grands Kyoshi Kurosawa) pour mieux garder le mystère ; une durée de film déraisonnable (3h30, les enfants ; avec le décalage horaire ça vous fait une séance à 9h30) qui semble dire : "Tout est tellement bien là-dedans que je n'ai rien pu couper, désolé mais je suis un génie"... On s'attend au pire.

eureka_poster01Et puis, il faut bien dire ce qui est, le charme agit : le noir et blanc, il est en fin de compte superbe, et il fonctionne parfaitement avec le sujet. Le sujet, même s'il reste opaque, est assez novateur (la survie d'un homme et de deux enfants après un braquage de bus, et donc la survie tout court). Les acteurs sont parfaits, jouant très sobrement des situations difficiles à jouer (c'est très beau, le japonais murmuré, ça change des graviers de Toshiro). La durée, totalement justifiée, le vrai fond du film ne prenant son sens que grâce à ce rythme, petit à petit, doucement. Chaque scène trouve sa place là-dedans, rien n'est en trop.

Alors d'accord, ça manque d'humour, c'est un peu trop ambitieux. Mais il faut reconnaître que la mise en scène est magnifique, avec d'amples mouvements de caméra très doux et très pensés, un cadrage toujours surprenant sans crânerie, un montage qui sait parfaitement où couper et où pousser au bout un plan, et un goût pour la lumière assez intéressant. Et puis on voit enfin des paysages contemporains japonais qu'on ne voit jamais d'habitude (sauf chez Kitano) : la campagne (c'est moi ou ça ressemble à la Creuse ?), les villages, la mer.

Du coup, j'ai presque envie de me retaper A Scene at the sea de Kitano ou Au Fil du temps de Wenders...

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